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20/06/2003
Peter Pan revient sur grand écran sous la direction de P.J. Hogan, avec Ludivine Sagnier en fée Clochette. Embarquez pour le Pays Imaginaire avec la première bande-annonce...

20/01/2003
Ludivine Sagnier et Johnny Hallyday sont les lauréats des prix Romy Schneider et Jean Gabin 2003, qui leur seront remis ce lundi 20 janvier.

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INTERVIEW - Ciné Live

Ludivine, vous connaissiez déjà l'univers assez particulier de François Ozon pour avoir joué dans "Gouttes d'eau sur pierres brûlantes". Catherine, vous n'avez pas eu trop de mal à vous y glisser ?

Catherine Deneuve : C'est vrai que nous étions nombreuses, et qu'au début, j'étais un peu déroutée. François est quelqu'un qui a une vision extrêmement précise des choses, avant même les mises en place avec les comédiens.
Ludivine Sagnier : Je me souviens que vous êtes venue me voir en me demandant comment cela se passait généralement avec lui.
CD : je n'étais pas tout à fait habituée à travailler comme ça, dans une telle organisation, ça m'a demandé un peu de temps.
LS : François a toujours une idée très détaillée de ce qu'il a envie de faire, et parfois, en tant qu'actrice, on peut avoir l'impression d'être un peu cloisonnée dans sa volonté. Il faut arriver à s'oublier. C'est vrai qu'il exerce un pouvoir qui, moi, m'intéresse et me fascine, mais évidemment, pour quelqu'un qui a l'expérience d'une liberté plus grande, cela peut s'avérer déconcertant.

Avez-vous eu l'impression, à la lecture du scénario, que l'écriture des personnages s'Inspirait de vos propres personnalités ?
LS : Ce qui était fabuleux dans ce scénario, c'est que les personnages étaient écrits tels quels dans la pièce de Robert Thomas, qui date des années 50, et qu'en même temps, c'est vrai qu'il était incroyable de voir à quel point cela renvoyait une image flagrante des comédiennes choisies par François.
CD : Oui, sauf que moi, j'étais assez étonnée. Je n'arrêtais pas de me dire : "Qu'est-ce qu'elle est méchante, cette Gaby !" Non que cela me gêne vraiment de jouer un personnage méchant, mais je trouvais que c'était une méchanceté au premier degré, et donc pas très intéressante. Je la voyais comme une femme égoïste, capricieuse, vaine... Après, j'ai dépassé cela parce que nous en avons parlé avec François et qu'il en est ressorti plus d'humour, plus d'ironie. Mais au début, je la trouvais idiote. Une poule ! C'était une petite poule ! (rires)

François Ozon parle d'un film qui privilégie la stylisation au profit de la beauté et du glamour féminins. Le glamour est donc tellement artificiel ?
CD : Le glamour de ce style-là, oui... un peu quand même.
LS : Quand on voit les films de Douglas Sirk, dont par exemple les costumes de "Huit femmes" sont inspirés, on n'imagine pas les gens se balader comme ça dans la rue...
CD : Quoique ! (rires) Les panthères, les petites robes serrées à la taille que porte Virginie [Ledoyen, NDLR]... Il est exact que le film se situe à une autre époque, et je pense que si ce n'était pas le cas, il y a des choses qui paraîtraient insupportables. D'abord, des éléments du récit comme le téléphone coupé ou l'enfermement ne fonctionneraient plus. Il faudrait trouver d'autres ressorts. Mais même, je dirais que ce côté "province", tout cela date. Tout, sauf la révolte de Catherine, que joue Ludivine...
LS : Pourtant, cette révolte est déjà très décalée par rapport à celle d'une jeune fille de maintenant. Mais c'est pour mieux faire passer les tabous.
CD : Oui, François transgresse à sa façon. Le prétexte d'une époque différente lui permet de dire des choses qu'il ne pourrait peut-être pas faire passer aussi facilement si c'était contemporain.

Comment avez-vous abordé les chorégraphies du film ?
CD : Nous nous sommes beaucoup amusées. François et son chorégraphe Sébastien Charles voulaient nous faire faire des choses très stylisées, mais qui ne fassent pas du tout comédie musicale, ce qui n'était d'ailleurs pas notre ambition. D'autant que François tenait à les tourner dans la continuité, donc le temps de la prise était assez long. Et nous ne sommes ni chanteuses ni danseuses...
LS : Je me souviens que ma chorégraphie correspondait à mon premier jour de tournage, et une fois que cela a été fait, j'étais...
CD : ... soulagée ?
LS : Je me suis dit : "Ça y est, c'est fait, je suis dedans. Je suis libre, je vais enfin pouvoir m'exprimer".
CD : Oui, parce que chanter, c'est quand même un ton au-dessus de la parole, et bouger en dansant, c'est un ton au-dessus des déplacements normaux. C'est vrai que l'on est dans l'excès, que l'on est obligé de trouver très vite ses marques. Mais cela donne sûrement une bonne assise pour le reste...
LS : Et puis, j'ai trouvé que cela avait nourri la complicité entre les comédiennes d'être dans la même galère. Les jours où une actrice avait sa chorégraphie, les autres l'encourageaient en lui chantant sa chanson.

Il y avait une belle complicité sur le plateau ?
CD : Ah oui. Entre les actrices, cela s'est très bien passé. Il régnait une très bonne entente, sans rivalités. Et Dieu sait pourtant que les personnages que nous incarnions étaient mesquins ! (rires)
LS : Au début, j'avais très peur. Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre et j'ai découvert une véritable solidarité. J'ai reçu un accueil merveilleux de ces femmes, qui sont un peu intimidantes quand même...
CD : Je suis sûre que c'est très vite tombé. C'est plus un a priori. Logique, d'ailleurs. Je me mets à votre place. Moi, j'aurais peut-être renoncé...

Vous ?
CD : A votre âge, à l'époque ? Oui, la timidité l'aurait peut-être emporté.
LS : Vous êtes plus peureuse que moi ?
CD : (rires) Je ne sais pas, je ne connais pas le degré de votre peur, mais plus jeune, j'aurais très bien pu dire que je n'en étais pas capable. L'idée d'être confrontée à toutes ces actrices...
LS : Vous m'avez toujours encouragée. Je me souviens très bien, le jour de ma tirade, vous étiez là, très présente. Vous m'avez même apporté à boire...

Le film fait référence à pas mal de cinéastes comme Sirk ou Hitchcock, mais dans le travail visuel et dans les choix esthétiques, iI y a un côté Jacques Demy... Les rôles de Ludivine et de Virginie Ledoyen ont une parenté avec ceux des "Demoiselles de Rochefort" et des "Parapluies de Cherbourg".
CD : Peut-être. Mais il y a quelque chose de moins agressif chez Demy. Les personnages sont plus mélancoliques, plus graves.
LS : Moi, ça me flatte d'entendre cette comparaison. Je n'aurais jamais osé la faire. Mais je pense qu'il y a quelque chose de plus... "propre" dans les films de Jacques Demy.
CD : En apparence seulement. Demy est beaucoup moins conte de fées qu'on ne le croit, beaucoup plus sombre qu'on ne le sent et beaucoup plus cruel qu'il n'y paraît.

Justement, Ludivine, y a-t-il dans la filmographie de Catherine Deneuve, certains films...
CD : Dites "non, non et non" avant qu'il ait fini sa question ! (rires)
LS : (elle n'obéit pas) ... qui m'ont marquée ?
CD : Mais le cinéma est très différent aujourd'hui ! A mon avis, si l'on revoit des films comme ceux dont nous venons de parler, même si on les aime et que l'on aime les actrices qui jouent dedans, on ne peut pas forcément s'identifier.
LS : Catherine m'a fascinée dans "Belle de jour" ou dans "Le dernier métro". Celui-là, je ne sais même pas combien de fois je l'ai vu ! Mais ces films sont faits, et je ne peux pas dire que ce sont des rôles que j'aurais aimé interpréter.
CD : Pour moi, d'une certaine façon, les films appartiennent plus aux acteurs qu'on ne le croit. Du moment où un film vous plaît, c'est quand même très lié aux acteurs et à leur interprétation. Ils sont mis en scène, mais c'est eux qui interprètent, que l'on regarde et auxquels on s'identifie éventuellement.

Démarrer une carrière aujourd'hui vous semble-t-il plus délicat qu'il y a une trentaine d'années ?
CD : Oui, cela me semble beaucoup plus dur d'être une jeune comédienne aujourd'hui que lorsque j'ai commencé.
LS : (faussement offusquée) Oh, merci !
CD : C'est parce qu'il y a beaucoup plus de comédiens. Cela me semble plus difficile d'exister, et encore plus de durer car je trouve que les films sont plus éphémères. Ils passent très vite à la télévision, ils ne sont pas regardés comme avant. Il existe toujours des amoureux du 7e Art, mais il n'empêche que le cinéma n'est plus perçu de la même façon.
LS : Mais lorsque vous aviez 20 ans, vous aviez le sentiment qu'il fallait vous battre ?
CD : Pas du tout. Et je n'ai pas beaucoup plus ce sentiment aujourd'hui (rires). Je suis du genre à persévérer ou à renoncer, mais pas à me battre. Sans doute parce que je n'ai pas été élevée comme ça, à la rivalité, au combat ou à la difficulté. Je vois aujourd'hui les castings, avec ces filles qui savent qu'elles sont plusieurs à être sur le même rôle. Cela ne se faisait pas lorsque j'ai débuté. Cette idée de la compétition m'aurait sans doute fait perdre beaucoup de moyens.
LS : Moi, je ne ressens pas encore la difficulté de la compétition. Peut-être est-ce un leurre, et qu'elle est sûrement présente. Mais je ne la vois pas tellement. Ma peur, c'est surtout de ne pas être capable de faire les bons choix. Quand je vois tous les films que vous avez faits, je trouve qu'il y a une certaine cohérence dans vos choix.
CD : Peut-être à l'arrivée, oui, mais au départ, on ne sait jamais. Et heureusement, d'ailleurs...
LS : Pour moi, c'est une page blanche...
CD : Mais c'est une page blanche ! D'abord parce que beaucoup de choses ne vous appartiennent pas. Certaines se font, d'autres se défont. Et finalement, c'est une lecture qui se modifie en fonction du temps. Aujourd'hui, on ne me parle pas des "Parapluies de Cherbourg" comme il y a vingt ans. De même. "La sirène du Mississipi" n'a pas été vu à l'époque comme il l'est maintenant. La somme des choses est une addition qui se fait tous les jours, sans calcul. Mais c'est vrai qu'il y a une image qui se dessine. C'est pourquoi je me demande toujours pourquoi il faut faire des interviews des acteurs. Il n'y a qu'à regarder ce qu'ils font dans les films ! Au bout d'un moment, quand on connaît leurs films, on peut écrire sur eux parce qu'on a le droit de rêver, d'interpréter par rapport à la manière dont ils jouent, leur façon de bouger, ainsi que leurs choix et aussi ceux qu'ils n'ont pas faits. Autant ce que l'on fait que ce que l'on ne fait pas dit quelque chose d'un acteur, et donc d'une personnalité.
LS : Mais j'ai peur de faire des erreurs de choix.
CD : Vous savez, ils ont été égoïstes, mes choix. C'est avant tout pour moi-même, pour des rencontres. J'ai besoin d'être convaincue. Même si le succès, qui est une chose que l'on espère toujours, n'est pas à l'arrivée, il faut que j'aie mon intime conviction.
LS : Vous avez l'impression de choisir plutôt par rapport à un scénario, à un personnage ou à une rencontre humaine ? Moi, je n'arrive pas à trouver la priorité.
CD : Les priorités ne sont jamais les mêmes. Pour un premier film, il faut essayer de déceler si la personnalité du réalisateur vous plaît, si vous avez envie de vous engager avec lui. Parfois, on n'est pas emballé par le rôle, mais en revanche le scénario est formidable, donc on a envie de participer.

Ludivine, vous avez l'air encore plus perplexe...
LS : Non, non, j'écoute, j'entends...
CD : Vous savez, l'expérience appartient à une seule personne. Quelque part, tout cela n'a aucun intérêt pour Ludivine. Mais parfois, il y a des conversations qui vous éclairent. Le fait de se dire, par exemple : "Moi, je ne suis pas du tout comme cela" ou "Moi, je ne réagirais pas du tout comme ça".
LS : II m'arrive de lire des scénarios en oubliant que l'on m'a proposé un personnage, et je lis le script comme...
CD : ... une histoire ?
LS : Oui, tout à fait. Et lorsque j'ai fini, je me dis : "Mince, je n'ai pas regardé..."
CD : "... mais c'était quoi mon rôle ?" (rires)
LS : Dans ce cas, si je n'ai pas ressenti, si j'ai oublié que j'avais quelque chose à apporter, je ne pense pas que je vais me laisser aller dans cette voie-là.

Catherine, vous auriez le même type de réaction ?
CD : Non, parce que je lis beaucoup de scénarios, et depuis longtemps, donc j'arrive à lire et à regarder le personnage en même temps. Mais par exemple, lorsque j'ai lu "Dancer in the dark", si je n'avais pas su que Lars von Trier me l'avait envoyé en me disant bien qu'au départ le rôle n'avait pas été écrit pour moi mais pour une Américaine black de 40 ans, je ne suis pas sûre que j'aurais eu envie de le faire si ça n'avait pas été lui.

Peut-on vous demander quels sont vos projets ?
CD : Non. Vous pourriez, mais non... (rires)

Notre entretien s'est si mal passé ?
CD : Non, pas du tout, mais j'ai du mal à passer le cap de la fin de l'année, je ne suis pas encore dans 2002 ! (rires)

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